Dans mon entourage comme sur les réseaux sociaux, moult personnes soucieuses de leur impact environnemental vantent les mérites du matériel d’occasion, qu’il faudrait préférer au neuf. Je pense qu’elles se trompent de problème.

Certes, acheter du matériel d’occasion, c’est se satisfaire d’un appareil déjà produit plutôt que de déclencher la production d’un nouveau. C’est aussi donner une seconde vie à du matériel qui serait autrement devenu un déchet, contribuant prématurément à la pollution de notre environnement. En ce sens, l’achat de matériel d’occasion est vertueux.

Mais le marché de l’occasion est aussi connu pour alimenter la consommation et la production de nouveaux matériels. C’est en effet parce qu’il existe un marché de l’occasion leur permettant de revendre facilement leur ancien matériel que des personnes peu scrupuleuses renouvèlent leur matériel à un rythme déraisonnable. Le budget nécessaire à l’achat d’un nouveau matériel provient pour partie de la revente de l’ancien. Sans elle, acheter du matériel neuf nécessiterait la mobilisation d’une somme bien plus importante et les consommateurs réfléchiraient sans doute à deux fois avant de sortir leur carte bleue.

À mes yeux, le problème n’est pas l’achat, mais la durée de conservation du matériel. Qu’il soit neuf ou d’occasion, il faut veiller à l’utiliser le plus longtemps possible (enfin, tant que cela ne relève pas de l’ascèse).

J’achète essentiellement du matériel neuf1, mais je le fais durer :

  • Mon PC portable professionnel actuel date de 2018.
  • La durée de vie de mes PC personnels – poste familial et serveurs – est de onze à douze ans.
  • J’ai dû changer mon précédent smartphone après sept ans de bons et loyaux services, non à cause d’une panne, mais parce que deux applications importantes pour moi ne se satisfaisaient plus de ses ressources « faméliques »2. Mon nouveau smartphone est un FairPhone 5, conçu pour être durable et réparable, avec un support logiciel et matériel assuré pendant au moins huit ans.

Quand j’achète un PC neuf, je fais en sorte de disposer d’une machine :

  • efficace sur le plan énergétique ;
  • disposant d’un processeur plutôt haut de gamme, sans pour autant viser la bête de course (incompatible avec la sobriété énergétique) ;
  • dotée de beaucoup de mémoire vive (trop au moment de l’achat, mais acceptable douze ans plus tard) ;
  • équipée d’une connectique au gout du jour.

C’est la connectique qui m’a in fine poussé à changer de machine à plusieurs reprises. Les normes évoluent vite (sans doute pour soutenir le marché) et la connectique vieillit vite. Les nouveaux périphériques ne sont plus compatibles ou fonctionnent en mode vraiment dégradé avec les connecteurs disponibles sur une vieille machine (c’est aussi valable dans l’autre sens : j’ai dû jeter un clavier, vieux mais très confortable, car son contrôleur USB n’était pas assez précis pour le contrôleur de la machine que je venais d’acheter, la communication était erratique et entrainait le dysfonctionnement du système).

La durabilité de mes appareils doit beaucoup à l’utilisation d’un système et d’outils libres (Debian GNU/Linux). C’est une des raisons qui m’ont poussé à installer /e/OS sur mon Fairphone.

Savoir que je vais utiliser mon matériel pendant de longues années fait que je n’éprouve aucune culpabilité à l’acheter neuf. :)

Vignettes Tech

Au détour d’un post de Sébastien Magnan sur LinkedIn, j’ai découvert il y a quelques jours les « Vignettes Tech ». Leur design n’est pas sans rappeler feu les vignettes fiscales que nous collions sur le pare-brise de nos véhicules et c’est sans doute délibéré. Elles révèlent le nombre d’années d’utilisation de notre matériel. Sous une forme ludique, elles attirent l’attention et je suis certain qu’elles vont me permettre d’engager en toute candeur la conversation sur l’impact environnemental de la technologie et notre devoir de sobriété.

Je me suis empressé d’en commander quelques jeux et de les coller sur mes appareils. Voici ce que cela donne sur mon PC portable professionnel :

Vignettes Tech collées au dos de l’écran de mon PC portable, montrant que je l’utilise depuis 2018

Le jeu en contient de plus petites, à coller sur le smartphone. Vous pouvez les acheter sur le site La Vignette Tech.


  1. À l’exception des voitures, car le prix des voitures neuves les rend inaccessibles à bien des bourses et leur valeur dégringole vite. J’ai donc toujours acheté des voitures d’occasion et je le vis très bien vu que j’ai une relation à la voiture des plus platoniques. Une voiture est une machine avec laquelle je signe un pacte : je l’entretiens bien, sans rater la moindre révision, et en échange, elle m’emmène à bon port, sans me causer le moindre tracas. 

  2. Cette anecdote montre que les fabricants de matériel ne sont pas les seuls fautifs. Lorsque les développeurs ne se soucient pas assez de l’efficience de leur code et des ressources qu’il requiert, ils accélèrent l’obsolescence du matériel. Je comprends que les développeurs utilisent au quotidien des machines puissantes. Leur productivité et leur confort de travail en dépendent. Mais leur plateforme d’intégration continue devrait toujours vérifier l’exécution du code sur un matériel ancien, afin qu’ils puissent identifier et corriger les fonctions trop gourmandes.